Cours d’Economie Publique

Master 1 Sciences économiques

Sandye Gloria-Palermo

Année universitaire 2006-2007

 

Introduction.   Le rôle économique de l’état

 

Première partie. Fondements théoriques d’économie publique

 

Chapitre 1. L’efficience du marché

 La main invisible

 Economie du bien-être et efficience paretienne

 L’efficience économique

 

Chapitre 2. L’inefficience du marché

Droits de propriété

Echecs du marché

Redistribution

 

Chapitre 3. Efficience et équité

Le trade-off entre efficience et distribution

Analyse des choix sociaux

 

Deuxième partie. L’action publique à travers la fiscalité

 

Chapitre 4. Le système fiscal – une introduction

Les propriétés désirables d’un système fiscal

Choix entre systèmes fiscaux divers

Le système fiscal français

 

Chapitre 5. Impact économique de la fiscalité

En concurrence pure et parfaite

En situation de concurrence imparfaite

 

Chapitre 6. Fiscalité et efficience économique

Conséquences de la fiscalité sur les consommateurs

Conséquences de la fiscalité sur les producteurs

Conséquences de la fiscalité sur les marchés financiers et sur le marché du travail

 

Bibliographie

- Manuel de reference:

J. Stiglitz (1986, 1988, 2000) Economics of the Public Sector. Norton and Company, New York.

- Sur les fondements:

F. Lévêque (2004) : Economie de la règlementation. Repères, La découverte, Paris.

- Sur les applications :

Rapports du CAE (Conseil d’analyse économique) : http://www.cae.gouv.fr/

(sur le système fiscal français, voir en particulier les n° 3, 8, 11, 17, 24).


Introduction. Le rôle économique de l’état

 

1.        Les systèmes d’économie mixte

Dans les économies mixtes, l’activité économique est menée à la fois par des entreprises privées et publiques.

 

2.        Le rôle de l’état dans la pensée économique

A partir de l’analyse d’Adam Smith, la théorie économique dominante met l’accent sur l’efficience du jeu du marché privé. Il existe cependant des défaillances du marché qui viennent justifier l’intervention.

 

3.        Classification économique des interventions de l’état

Les interventions incitatives visent à influencer le comportement des agents ; les interventions productives concernent la production de services publics et biens collectifs ; les interventions redistributives permettent de transférer les ressources entre les agents.

 

4.        Les moyens de financement des interventions

Impôts, emprunts ou tarification.

Le théorème ricardien d’équivalence explique qu’il est équivalent de financer la dette publique par le recours à l’impôt ou par le recours à l’emprunt.

 

5.        Justification de l’intervention publique

Les défaillances du marché, telles que les crises de surproduction des années 30, la stagflation des années 70, justifient l’intervention de l’état.

 

6.        Justification de la non intervention

L’intervention publique est elle-même sujette à des inefficiences dues : aux difficultés de prévoir toutes les conséquences des actions publiques ; aux difficultés d’influer sur ces conséquences ; aux difficultés d’appliquer les décisions publiques ; aux difficultés politiques liées è l’existence de groupes de pression.

 

7.        Un consensus difficile à faire émerger

La diversité des positions des économistes découle de désaccords sur les hypothèses des théories positives ; sur l’intensité des réactions de l’économie aux politiques publiques ; sur les jugements de valeur des économistes.


Chapitre 1. L’efficience du marché

 

  1. La main invisible

La coordination par le marché est l’un des trois modes possible de gestion du problème de la rareté, aux cotés de la tradition et de l’autorité.

 

 

  1. Economie du bien-être et efficience paretienne

2.1.       Définition

Les allocations de ressources qui ont la propriété de ne pas pouvoir améliorer la situation d’un individu sans dégrader celle d’un autre sont définies des allocations efficientes au sens de Pareto.

Le principe de Pareto est basé sur des valeurs individualistes. Chaque fois qu’il existe une amélioration de Pareto, i.e. la possibilité d’améliorer la situation d’un individu sans dégrader celle de personne, il est juste d’y procéder. Toutefois, la plupart des décisions publiques concernent des situations où existent un trade-off, i.e. où l’amélioration de la situation d’un individu implique la dégradation de celle de quelqu’un d’autre.

Selon le principe de la souveraineté du consommateur, les individus sont les meilleurs juges de leurs besoins et de leur satisfaction.

2.2.       Les deux théorèmes fondamentaux de l’économie du bien-être

Les deux théorèmes fondamentaux du bien-être identifient les conditions sous lesquelles une économie concurrentielle est Pareto efficiente (premier théorème) et les conditions sous lesquelles n’importe quelle allocation Pareto efficace peut être obtenue à travers le jeu du marché étant donnée une redistribution appropriée des dotations initiales (second théorème).

 

  1. Analyse de l’efficience économique

L’efficience au sens de Pareto implique la réalisation simultanée de l’efficience dans l’échange, dans la production et dans la composition du produit.

3.1.       L’efficience dans l’échange 

Etant donnés l’ensemble des biens disponibles dans l’économie, il n’est pas possible améliorer la situation d’un consommateur sans dégrader celle d’un autre.

Le taux marginal de substitution pour chaque couple de biens doit être le même pour tout consommateur ; en CPP où les prix sont les mêmes pour tous cette condition est respectée.

3.2.       L’efficience dans la production

Etant donné l’ensemble des ressources disponibles dans l’économie, il n’est pas possible augmenter la production d’un bien sans réduire celle d’un autre bien.

Le taux marginal de substitution technique pour chaque couple d’inputs doit être le même pour tout producteur ; en CPP où les prix des inputs sont les mêmes pour tous cette condition est respectée.

3.3.       L’efficience dans la composition du produit

Le taux marginal de transformation doit être égal au taux marginal de substitution ; en CPP cette condition est respectée.

En situation de concurrence pure et parfaite, ces conditions sont toutes trois remplies.


Chapitre 2. Les défaillances du marché

 

L’Etat doit définir et garantir le respect des droits de propriété et des contrats. Sans cette garantie, les marchés ne fonctionneraient pas. [1ier niveau d’intervention]

 

1. Les défaillances du marché

Le marché de concurrence pure et parfaite permet d’atteindre sous certaines conditions une allocation des ressources optimale au sens de Pareto. Si ces conditions ne sont pas respectées, l’intervention de l’Etat est justifiée. [2ième niveau d’intervention]

Il existe six causes pour lesquelles un marché ne permet pas d’atteindre une allocation efficace au sens de Pareto :

1.1.       Une concurrence insuffisante

En situation de concurrence imparfaite, le marché est rationné (prix supérieurs à l’équilibre concurrentiel et quantités offertes inférieures).

1.2.       Les biens collectifs

Ces biens ont deux caractéristiques :

-         la non-exclusion (il n’est pas possible d’empêcher des individus de bénéficier de l’usage de ce type de bien) ;

-         la non-rivalité (le coût marginal lié à la consommation du bien par un individu est nul)

1.2.1.               conséquence de la non-rivalité

Le marché seul n’est pas à même d’offrir ce bien en quantité suffisante.

1.2.2.               le problème du free-rider

Le problème du passager clandestin apparaît quand le bien n’est pas excludable. Les agents sont alors incités à profiter du bien sans en supporter les couts. Si tous raisonnent ainsi, personne ne supportera les couts et le bien ne sera pas produit.

1.2.3.               biens collectifs purs et mixtes

Il existe quelques exemples de biens collectifs purs comme la défense nationale ; cependant la plupart des biens offerts par l’état sont mixtes, l’exclusion quoique couteuse étant possible.

1.2.4.               biens privés fourni par le secteur public

Il s’agit de biens dont la consommation est rivale. Si ces biens sont offerts gratuitement il y aura un excès de consommation. Il existe trois méthodes de rationnement outre le système des prix : les files d’attente, les tarifs (péages), l’offre uniforme (fourniture identique pour tous les individus).

1.3.       Les externalités

L’action économique d’un agent influence le bien-etre d’un autre agent (de façon positive ou négative) sans que cela ne passe par le marché.

1.3.1.               externalités et inefficiences

Il y a externalité (négative) lorsque la courbe de cout marginal privée est inférieure à la courbe de cout marginal sociale.

Les biens qui génèrent des externalités négatives sont produits en quantité excessive alors que les biens qui génèrent des externalités positives sont généralement produits en quantité trop faible par rapport à l’efficience économique.

1.3.2.               solutions privés

Parfois, l’efficience économique peut etre retrouvée sans recours à l’intervention publique :

-       en constituant des unités économique suffisamment large pour pouvoir incorporer les externalités ;

-       en établissant des droits de propriétés précis qui permettent aux agents privés de trouver, à travers la négociation, une solution efficiente (théorème de Coase) ;

-       en recourant à la loi pour obliger les agents qui génèrent des externalités négatives à rembourser les victimes.

1.3.3.               solutions publiques

Il en existe 4 : les impots ; les subventions, les règlementations et les permis négociables.

1.4.       L’incomplétude des marchés

Un marché incomplet est un marché rationné malgré la disponibilité à payer des consommateurs. Pour quelles raisons ?

- marché très innovant ;

- coûts de transaction élevés ;

- problèmes d’information asymétrique à l’origine de phénomènes de hasard moral et de sélection adverse (lorsque l’une des parties du contrat tire bénéfice d’une information dont il a l’exclusivité, au détriment de l’autre, soit après soit avant la signature du contrat).

1.5. L’information incomplète

L’information est assimilable à un bien collectif.

1.6.       Situations macroéconomiques inefficientes

Keynes a théorisé la possibilité d’un équilibre général de sous-emploi qui justifie le pilotage des principales grandeurs macroéconomiques à travers la mise en œuvre de politiques économiques appropriées.

 

2. Distribution et paternalisme

L’intervention de l’Etat est légitime même en l’absence de défaillance du marché dans les deux cas suivants [3ième niveau d’intervention] :

 - le jeu concurrentiel peut générer une distribution des revenus socialement non acceptable ;

-         selon certains, les individus, même s’ils sont bien informés, ne sont pas à même de développer une bonne capacité de jugement quant aux biens à consommer. Cette attitude paternaliste est la justification des réglementations qui interdisent la consommation de certains produits ou qui au contraire, définissent la production des biens dits méritoires.

 

 

Chapitre 3.  Efficience et Equité

 

 

L’économie du bien-être – économie normative – s’occupe des critères d’évaluation de politiques économiques alternatives. Il s’agit d’arbitrer le trade-off entre efficience économique et équité sociale.

 

1. Le trade-off entre efficience et équité

La fonction de bien-être social fournit un schéma pour l’analyse des conséquences distributives d’une politique. Elle spécifie l’augmentation d’utilité d’un individu nécessaire pour compenser la diminution d’utilité d’un autre individu.

1.1.           Analyse des choix sociaux

Les économistes cherchent à utiliser le même schéma conceptuel que pour le calcul de l’optimum du consommateur.

1.1.1.     Identification du trade-off

La réponse est donnée par la courbe des possibles.

1.1.2.     Evaluation du trade-off

La réponse est donnée par les courbes d’indifférences sociales :

-         dans sa version utilitariste, le bien-être social est égal à la somme des utilités des membres individuels de la société ;

-         dans sa version Rawlsienne, le bien-être social correspond à l’utilité de l’individu le plus mal loti de la société.

1.2.  Deux critiques

On ne peut procéder à des confrontations interpersonnelles d’utilité ;

Il est impossible de trouver une procédure démocratique d’agrégation des préférences individuelles (théorème d’impossibilité de Arrow).

 

2.    Les choix sociaux dans la pratique

Dans la pratique, pour évaluer les propositions alternatives, on ne calcule pas l’impact d’une proposition sur chaque membre de la collectivité mais on en synthétise les effets à travers une mesure des inégalités (sur quelques groupes sociaux bien déterminés) et une mesure des gains et pertes d’efficience. Des propositions alternatives présentent souvent un trade-off entre efficience et équité : pour pouvoir obtenir plus d’égalité, il faut être prêt à renoncer à une certaine dose d’efficience. Il existe des opinions diverses concernant :

-         la nature du trade-off : à quel montant d’efficience doit-on renoncer pour obtenir une certaine dose d’équité supplémentaire (discussion positive);

-         les jugements de valeurs : quel montant d’efficience est-on prêt à sacrifier pour pouvoir obtenir une certaine dose d’équité supplémentaire (jugement normatif).

2.1. Mesure de l’efficience

-courbes de demande ordinaire et compensée

- le surplus du consommateur

Le surplus du consommateur (combien les individus sont prêts à payer pour un projet ou un programme public au-delà de ce que cela leur coûte effectivement) est utilisé pour calculer les bénéfices agrégés d’un projet ou d’un programme.

-la mesure de l’inefficience

Le concept de perte de bien-être est utilisé pour calculer l’inefficience d’un impôt.

2.2. Mesure de l’équité

Indices de pauvreté comme l’indice de Gini

 

3. Synthèse

Lorsqu’il n’est pas possible d’obtenir une amélioration au sens de Pareto, trois approches des choix sociaux sont possibles :

-         le principe de compensation qui cherche à rendre efficient au sens de Pareto l’intervention publique à travers une redistribution des gains et des pertes de chacun ;

-         l’évaluation du trade-off à partir des indicateurs d’efficience et d’équité sur différentes catégories sociales ;

-         les bénéfices nets pondérés qui attribue à chaque catégorie sociale une importance différente au sein de la courbe de bien-être collective.

 

 

Chapitre 4. Le système fiscal – introduction

 

 

1.      Les 5 caractéristiques d’un système fiscal désirable

1.1.  L’efficience économique

Tous les impôts influencent le comportement des individus ; les distorsions sont associées aux actions qu’un individu peut entreprendre pour éviter les impôts.

Le système fiscal ne devrait pas être distorsif ; il devrait être au contraire utilisé pour améliorer l’efficience économique.

Les impôts ont des effets sur les comportements individuels ; des effets financiers ; des effets sur l’organisation des entreprises ; des effets d’équilibre général ; des effets d’annonce et de capitalisation.

Les impôts à somme fixe n’ont pas d’effet de distorsion.

Les impôts correctifs cherchent un impact sur les externalités négatives : ils permettent d’augmenter les entrées fiscales et d’améliorer l’efficience économique.

1.2.  La simplicité administrative

Le système fiscal devrait avoir des coûts administratifs et de mise en œuvre faibles.

1.3.  La flexibilité

Le système fiscal devrait s’adapter facilement aux changements des conditions économiques, soit de façon automatique (stabilisateurs macroéconomiques) soit suite à une volonté politique.

1.4.  La transparence politique

Le système fiscal devrait être transparent.

1.5.  L’équité

Le système fiscal devrait traiter de façon identique les individus qui se trouvent dans des situations similaires (équité horizontale) et demander plus de contribution de la part des individus en mesure de mieux supporter la pression fiscale (équité verticale).

 

2.      Un schéma général pour le choix entre différents systèmes fiscaux

Taxation pareto efficiente : étant donné le niveau des entrées fiscales, il n’est pas possible d’améliorer le bien-être d’un individu sans dégrader celui d’un autre. Le choix entre systèmes fiscaux pareto efficients dépend des valeurs incorporées dans la fonction de bien-être sociale :

-         la fonction utilitariste choisi le système fiscal qui maximise la somme des utilités individuelles (la perte d’utilité marginale pour un euro d’impôt supplémentaire doit être la même pour tous) ;

-         la fonction de bien-être rawlsienne choisit le système fiscal pareto efficient qui maximise l’utilité de l’individu le plus mal lotti.

 

3.      Le système fiscal français

3.1.  Les prélèvements obligatoires

Ensemble des versements (impôts, taxes et cotisations sociales) effectués par des personnes physiques et morales aux administrations publiques afin de financer leurs dépenses de façon non volontaire et obligatoire.

3.2.  Les différents impôts perçus

Impôts directs (TVA 45,5%, TIPP 7,5%, autres) et indirects (IR 20,3%, IS 14,6%, autres)

3.3.                 La fiscalité comme moyen de réduire les inégalités sociales

Un système fiscal est fortement redistributif lorsque les prélèvements progressifs y occupent une place prépondérante par rapport aux prélèvements proportionnels. En France le taux des prélèvements obligatoires sont relativement élevés mais n’ont pas l’effet égalisateur escompté.

Le taux marginal d’imposition indique de combien augmentent les impôts et diminuent les transferts suite à une hausse marginale du revenu. En France, ces taux décrivent une courbe en U (plus élevés pour les bas et hauts salaires que pour la classe moyenne).